QPC : Abroger la pénalisation du client, ce serait favoriser la loi du plus fort

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Ce lundi 12 novembre, le Conseil d’Etat a décidé de transmettre au Conseil constitutionnel la « QPC » (question prioritaire de constitutionnalité) contre la pénalisation du recours à la prostitution d’autrui déposée par des associations militant pour la libéralisation du commerce du sexe.

Dans les médias, les lobbyistes et leur avocat cherchent à faire croire que leur procédure juridique contre la loi de 2016 est motivée par la recherche de la protection des droits fondamentaux (santé, sécurité) des personnes prostituées. Mais « les arguments juridiques qu’ils ont soulevés au Conseil d’Etat sont ceux de la liberté d’entreprendre, et de la disproportion de la peine pour les clients » (qui, rappelons-le, encourent une amende quand jusqu’en 2016 les personnes prostituées encouraient une peine de prison), explique Lorraine Questiaux, chargée de mission juridique du Mouvement du Nid.

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Les membres du Conseil constitutionnel auront donc à trancher une question fondamentale de société : ils devront dire pour l’ensemble de la société, si la liberté de commerce prime sur les droits humains que sont le droit à la dignité, à l’intégrité des êtres, au respect du bien-être des personnes et à l’égalité entre les femmes et les hommes.

Pénaliser le client, c’est poser un interdit sociétal sur l’achat des êtres humains pour du sexe, sur la destruction de la santé des personnes les plus discriminées. C’est permettre de lutter contre le viol et l’exploitation des plus pauvres, de celles et ceux qui sont contraints à la prostitution par la force, la précarité ou l’absence d’alternatives. Pénaliser est indispensable pour abolir la violence : car sans « acheteur » il n’y a pas de prostitution !

Deux camps s’opposent donc : d’une part, celui, soutenu par le droit existant, qui reconnait que la prostitution est une exploitation de l’individu (qui plus est les plus vulnérables et les plus discriminés, majoritairement des personnes racisées, des femmes, des enfants, des personnes trans), qu’il s’agit d’une violence et d’une discrimination graves. De l’autre, le camp de ceux qui veulent un monde dans lequel le désir du plus fort, celui qui a le pouvoir financier, prime sur le désir du/de la plus faible.

« C’est incompatible avec une société d’égalité entre les femmes et les hommes, qui prône la réciprocité du désire», souligne Christine Blec, Présidente du Mouvement du Nid. « Il est important de prendre la mesure de l’importance des questions de société que soulève cette QPC », ajoute –t-elle, « car la prostitution n’est pas une question périphérique. Elle nous concerne toutes et tous, elle est à l’intersection de tous les systèmes de domination, des riches sur les pauvres, des hommes sur les femmes, des blancs sur les personnes racisées ».

Pour nous, militantes et militants des droits humains, et d’une société qui soutient les plus vulnérables, c’est clair : nous ne voulons pas d’une société où le viol tarifé est un marché comme un autre, dans laquelle les seules valeurs reconnues par le droit sont celles qui se confondent avec les intérêts des privilégiés !

Le Mouvement du Nid est une association loi 1901 reconnue d’utilité publique qui lutte contre les causes et les conséquences de la prostitution.
Chaque année, nous rencontrons plus de 5 000 personnes prostituées sur les lieux de prostitution et en accompagnons un millier dans nos permanence.
L’association est agréée Education nationale, Ofpra et pour les parcours de sortie de la prostitution mis en place par la loi du 13 avril 2016